Les « hybrides » : faux problème, vrai enfumage

Certains éleveurs anti-loups affirment que les loups de France seraient des « hybrides loups/chiens », en se basant sur une « étude » réalisée à partir de leurs propres relevés. Face à cette enfumage, les associations de CAP Loup tiennent à rétablir quelques éléments factuels et scientifiques pour une meilleure compréhension d’une question complexe.

L’ « étude » des éleveurs est basée sur des éléments invérifiables
Les éleveurs ont payé un laboratoire de génétique allemand pour réaliser des analyses à partir d’échantillons fournis par eux-mêmes (crottes, poils…). Or rien ne prouve que les échantillons ne soient pas truqués dès le départ (origine, nature…), s’agissant de certains éleveurs qui ont montré depuis des années, non seulement leur idéologie anti-loup primaire, mais surtout leur acharnement à propager diverses théories du complot, toujours invalidées par les scientifiques. Il est évident qu’une étude scientifique digne de ce nom sur les loups ne saurait être confiée, pour les relevés de terrain, à la frange d’éleveurs anti-loup la plus malhonnête. 

Le manque de rigueur scientifique de cette « étude » est démontré et détaillé dans une note critique produite par l’ONCFS*.

La seule étude vérifiable confirme la rareté de l’hybridation en France
Une étude réalisée par l’ONCFS* avec le laboratoire de génétique Antagène en 2017 montre que l’hybridation entre loups et chiens existe en France (à cause de la divagation des chiens) mais reste un phénomène très rare, comme ailleurs dans le monde.

 → Télécharger l’étude réalisée par l’ONCFS* :

 mini-logo_pdfRésultats de l’étude génétique sur l’hybridation possible des loups en France – laboratoire Antagène – août 2017.

mini-logo_pdf  Note technique de l’ONCFS sur l’hybridation

 Critique technique par l’ONCFS* de l’étude des éleveurs – novembre 2017mini-logo_pdf

Quelques rappels : deux cousins apparentés mais bien distincts
Les chiens actuels (Canis lupus familiaris) sont les descendants des premiers chiens apparus il y a environ 15 000 ans à 40 000 ans suite à la domestication par l’homme de certains loups (Canis lupus). Chiens et loups sont donc de la même espèce, et des croisements ont pu continuer à se produire en faible quantité au fil de l’histoire. Mais les études les plus récentes montrent que le loup et le chien restent génétiquement bien séparés : les loups restent des loups, et les chiens restent des chiens.

→ Télécharger les publications scientifiques suivantes :

mini-logo_pdfBotigué L., Song S., Scheu A., Gopalan S., Pendleton A., Oetjens M., Taravella A., Seregélly T., Zeeb-Lans A., Aarbogast R.-M., Bobo D, Daly K, Unterländer M., Burger G., Kidd J., Veeramah K. (2017). Ancient Europ dog genoms reveals continuity since the early Neolithic. Nature communication 8:16082 | DOI: 10.1038/ncomms16082
mini-logo_pdfFreedman A.H., Gronau I., Schweizer R.M., Ortega-Del Vecchyo D., Han E., et al. (2014). Genome sequencing highlights the dynamic early history of dogs. PLoS Genet 10 (1): e1004016. doi:10.1371/journal.pgen.1004016.

mini-logo_pdfSkoglund P., Gotherstrom A., Jakobsson M. (2011). Estimation of population divergence times from non-overlapping genomic sequences: examples from dogs and wolves. Mol Biol Evol 28: 1505–1517.

mini-logo_pdfVerardi, A., Lucchini, V., Randi, E. (2006). Detecting introgressive hybridization between free-ranging domestic dogs and wild wolves (Canis lupus) by admixture linkage disequilibrium analysis. Molecular Ecology 15: 2845-2855.

L’hybridation, une question à prendre en compte sereinement
Depuis quelques années dans certains endroits d’Europe (Italie, Espagne, Suède, Lettonie, Estonie) y compris en France, les scientifiques détectent parmi la population de loups des hybrides, résultant de croisements récents ou plus anciens entre des loups et des chiens divagants. Si beaucoup d’hybridation se produit parmi une population de loups, ses caractéristiques génétiques peuvent en être modifiées. L’hybridation doit donc être surveillée et réduite au maximum. Là où elle est constatée à ce jour, elle concernerait 5% des individus (1-2% en France), ne remettant pas en cause le loup en tant que tel, ni dans son patrimoine génétique, ni dans son rôle fonctionnel dans les écosystèmes.

Téléchargez les publications scientifiques suivantes :
mini-logo_pdfRandi E., Hulva P., Fabbri E., Galaverni M., Galov A., et al. (2014). Multilocus detection of wolf x dog hybridization in Italy, and guidelines for marker selection. PLoS ONE 9(1): e86409. doi:10.1371/journal.pone.0086409.

mini-logo_pdfHindrikson M., Männil. P., Ozolins J., Krzywinski A., Saarma U. (2012). Bucking the trend in wolf-dog hybridization: first evidence from Europe of hybridization between Female dogs and male wolves. PLoS ONE 7(10): e46465. doi:10.1371/journal.pone.0046465.

mini-logo_pdfBoitani L. (2000). Action plan for the conservation of the wolves (Canis lupus) in Europe, Nature and Environment No. 113 (Council of Europe Publishing).

 

Protéger les loups permet d’aider les éleveurs
La protection réglementaire du Loup permet aux éleveurs d’être aidés financièrement. S’acharner à vouloir montrer qu’il n’y aurait « que des hybrides » et à demander la fin de la protection réglementaire du Loup, comme le font certains éleveurs, revient à demander la fin des indemnisations liées à la prédation. Est-ce vraiment ce que veulent les éleveurs ? Si certains éleveurs ont de l’argent à dépenser pour payer des études scientifiques, ils feraient mieux de le mettre au service du développement de nouvelles techniques d’effarouchement des loups et de protection des troupeaux. 

D’autre part, le fait que la Convention de Berne (signée par la France) protège réglementairement les hybrides loup/chien est dû à la volonté d’éviter l’abattage incontrôlé des loups : en effet, loups et hybrides peuvent être impossibles à différencier visuellement. Parallèlement, cette protection réglementaire n’empêche pas les États de mener une politique visant à empêcher l’expansion des hybrides parmi la population de loups, comme le fait déjà l’Italie. Ceci doit relever de mesures officielles à partir des connaissances scientifiques.

 

Les associations de CAP Loup

 

* ONCFS : Office national de la chasse et de la faune sauvage